Organisées en triptyque, trois novellas se répondent pour illustrer et décrypter ce qui fait l’essence d’un univers d’enfant.
Une chasse-galerie inversée, vue depuis un party de Noël, une enfant immobilisée dans la forêt de son silence, une petite fille malhabile comme un cygne parmi des canards, trois histoires d’enfance, mais racontées par l’adulte qu’ils sont devenus.
L’auteure a voulu rendre à l’enfant qu’elle a été la capacité de dire ce qu’elle a vu. Elle nous raconte le monde à sa hauteur. Et rappelle aux adultes ce qu’ils ont, pour la plupart, oublié: la force d’impression que la réalité peut avoir sur nous quand on est tout petit.
Extrait
Les enfants peuvent ainsi, d’une seconde à l’autre, avoir tout leur être saisi, happé par un nouvel intérêt: ils iront en courant, le corps et l’esprit au-devant du plaisir, d’un seul mouvement. Les adultes sont plus lourds, on dirait qu’ils s’économisent. Pour les mettre en branle, il faut beaucoup, il faut du fort, du neuf ou bien de l’urgence, car la joie ne les fait plus courir, ne vient plus chercher en eux qu’un élan apaisé et revenu de tout. Jamais une émission ne les fera se précipiter, je veux dire à toutes jambes: leur énergie est dosée, qui leur permet d’avancer leur train poussif tout au long de la journée et des responsabilités. Les enfants, eux, démarrent au quart de tour, se propulsent vers le plaisir, freinent abruptement, s’écrasent de fatigue, avec une énergie en va-et-vient, capricieuse et tout de suite dilapidée, parce qu’ils ne comptent pas ni ne prévoient une suite à l’intensité du moment. La sensation de bonheur tient sans doute à cet état, une immersion totale dans l’instant, dans la fête du présent, qui rend leur motivation à la vie très forte.