Sept jours. C’est le temps qu’il reste avant le dynamitage d’un immeuble qui doit céder sa place à une autoroute. C’est aussi le temps que devait durer la traversée en bateau de trois gitans partis chercher refuge en Amérique.
Trois récits se chevauchent pendant ce compte à rebours. Celui d’Adrien, l’un des derniers locataires de l’immeuble, qui rapaille ses souvenirs dans une ville qui lui semble soudain étrangère. Celui de Paz, son fils adoptif, qui raconte l’éprouvante odyssée en bateau qui l’a conduit jusqu’à lui. Celui de Sophie, la fille d’une autre locataire, qui décrit sa détresse dans un cahier noir et se souvient de la mort de son père, survenue quand elle était petite.
Deux lieux se répondent à quelques années d’intervalle: le container, froid et inhospitalier, dans lequel Paz a failli trouver la mort, et l’immeuble en train de se dégrader, d’agoniser en quelque sorte, puissante métaphore de toutes les pertes, de toutes les morts qui jalonnent l’existence.
Une histoire s’écrit dans les entrelacs de ces récits et de ces lieux, une histoire à la fois sombre et lumineuse, faite de deuils et de recommencements, l’histoire d’êtres qui ont vécu et sont en train de vivre d’importantes métamorphoses.
Extrait
Toutes les fois où je repasse dans ma tête le moment de la chute de l’immeuble, le sol se dérobe sous mes pieds. Je me retrouve à tes côtés, dans le container. Il n’y a plus de terre sous mes pieds. Il n’y a plus de ciel dans mes rêves. Je ne vois plus, n’entends plus, ne bouge plus. Je suis enfermé dans une boîte de métal sur laquelle on a posé d’autres boîtes de métal. Personne ne sait que je suis à bord et que je me bats pour survivre. Ma lutte est inaudible. Mes gestes sont vains. Ma voix se tait. Quand j’en sors, de cette image, de cette route qui fut la tienne pour venir jusqu’à nous, je m’assois pour écrire. C’est le seul geste – écrire – qui ne soit pas vain. Je ne sais pas ce que ça donnera, mais je travaille en ce moment à un roman qui parlera de fins du monde et de recommencements, de fleuves qui se jettent dans l’océan tandis que des enfants blessés cherchent où soigner leurs plaies et que des immeubles explosent sous un ciel indifférent.