Manu Ségalotti est un jeune Français de 20 ans, l’âge où l’on veut devenir quelqu’un (mais qui?) et faire quelque chose de sa vie (mais quoi?), l’âge où les rêves adolescents se heurtent à la réalité adulte.
Sa réalité, c’est son père qui le pousse à se trouver un travail, le service militaire obligatoire, pendant un an, puis un emploi dans les archives d’une banque, sorte de labyrinthe où il passe ses journées à chercher des chèques perdus. C’est sa vie à lui, qui lui semble alors perdue. Son rêve, c’est de suivre les traces de Robert Capa, le célèbre photographe de guerre.
Sa réalité, c’est aussi les amours transitoires, avec Françoise, d’abord, la Bretonne amoureuse d’un autre, puis avec Véro, une étudiante aux Beaux-Arts; le rêve, c’est Lou, la blonde qui lui apparaît chaque fois qu’il vient près de perdre espoir.
Quand la réalité étouffe trop le rêve, Manu fait comme Kerouac: il part en voyage. Au début du roman, il quitte les États-Unis pour le Québec, où il arrive bien vite à Tadoussac, attiré par une annonce, «Traîneaux à chiens – Tadoussac», et poussé par le désir de découvrir une autre réalité, celle que décrit Jack London dans son roman Croc-Blanc, celle de ses rêves d’enfant peuplés de cow-boys et de trappeurs, emplis du Nord et des grands espaces. C’est dans une auberge au bord de la 138, où il reviendra à deux reprises, que se déroule la majorité du roman. Là, il croise plusieurs autres jeunes en quête de rêves, eux aussi, et bien vite rattrapés par la réalité. Heureusement qu’il y a l’amitié, plus forte que tout.
Extrait
Et je lui reparlai du Québec, de Tadoussac, imaginai nos futurs voyages, les plages d’Afrique, et pourquoi pas d’Australie. N’importe où, mais loin de ce pays, avec nos vingt ans en poche, l’avenir devant nous comme une voie rapide, une autoroute sans destination, sinon la mer à l’horizon, une ultime course contre la montre.
— C’est ça, je lui dis, le voyage. Sans savoir où, jamais.
— Et s’il y a un mur?
— Il y a toujours un mur. Un jour ou l’autre il y a forcément un mur.