Fermer

Lectures boréales

Une sélection de récits chatoyants, aux aurores réconfortantes, qui nous invitent à vivre les frissons du Nord.

J’ai cherché le Nord comme un saumon, remonté ma mémoire jusqu’à sa source, dans un pays où poussent des fleurs de givre quand le froid contracte des montagnes entières. Je l’ai cherché dans le secret des sous-bois, là où les orignaux se réchauffent sous des couvertures de silence. Là où le printemps venu, les pétales coupants de janvier fondent, coulent et glissent et ne gardent de leur cristal que les tintements dans le rire argentin des ruisseaux.

Jean Désy côtoie le Grand Nord et ses habitants depuis près de 30 ans dans le cadre de sa pratique médicale. Éveilleur de consciences, sonneur d’alerte, il signe ici un essai tiré du journal de ses séjours des quatre dernières années à Salluit en tant que médecin dépanneur. Pour manifester son soutien au peuple inuit, l’homme d’action se fait livre ouvert, partage ses méditations et observations sur un monde nordique affecté par une crise sans précédent, caractérisée par un taux de suicide dramatique.

Anouk a quitté son appartement confortable de Montréal pour un refuge forestier délabré au Kamouraska. Encabanée loin de tout dans le plus rude des hivers, elle livre son récit sous la forme d’un carnet de bord semé d’illustrations. Cherchant à apprivoiser son mode de vie frugal et à chasser sa peur, elle couche sur papier la métamorphose qui s’opère en elle : la peur du noir et des coyotes fait place à l’émerveillement ; le dégoût du système, à l’espoir ; les difficultés du quotidien, au perfectionnement des techniques de déneigement, de chauffage du poêle, de cohabitation avec les bêtes qui règnent dans la forêt boréale…

Toi, mon patient que je ne sus jamais vraiment aimer. Aimer pour aimer, aimer comme on aime avec ses tripes sans savoir pourquoi, aimer comme on aime les oies sauvages sans autre raison que leur si beau vol, aimer du fin fond de la tête sans rien à dire d’intelligent. Aimer sans rien d’autre pour nuire à cet amour qui devrait nous lier, toi le malade, l’alité, le souffrant, le quasiment mort, et moi le soignant, le docte, le connaisseur, le thaumaturge. Patient, tu le fus! Mon ami? Peut-être…

Sept ans ont passé depuis les événements ayant ébranlé Schefferville, mais Émile Morin n’a jamais tourné la page. Son obsession pour la Métald’Or et autres pilleurs du Nord en mal d’éthique l’a mené à prendre la tête d’une unité spéciale dédiée à ces dossiers, et à creuser, creuser encore. Faute de résultats probants, ou peut-être justement parce qu’il est sur le point d’en livrer, voilà qu’il sent son soutien politique vaciller. Sa santé mentale également.

L’enquêteur Morin a besoin d’une victoire. Pour prouver à sa hiérarchie qu’il avait raison de sonner l’alerte au sujet des minières ; pour convaincre Giovanni qu’il a fait le bon choix en endossant l’uniforme… Mais aussi pour rebâtir le lien de confiance l’unissant à sa fille, de plus en plus distante.

Chargé de ses cannes à pêche, Jean-Yves Soucy sillonne le Québec avec son épouse, en direction de la Côte-Nord. En chemin, il tombe en amour avec Baie-Trinité et sa Zec où il pourra taquiner la truite et peut-être pêcher enfin son premier saumon. Il installe sa roulotte sous les arbres du camping devant le fleuve, et y passe trois longs étés. C’est là qu’il mijote ce livre.

Il prend abondamment de notes et de photos sur place, mais graduellement le récit qu’il envisageait se transforme, élargit son horizon et devient la réflexion approfondie d’un homme non seulement sur sa poursuite d’un poisson «légendaire», mais aussi sur l’intrication de sa vie personnelle à la Vie en général, sur la nature, sur l’histoire, sur la place dérisoire et pourtant centrale qu’il occupe dans l’Univers, entre l’infiniment petit et l’infiniment grand. Car l’être humain, en tant que «poussières d’étoiles», devient la matière qui se contemple elle-même.

Lucie Lachapelle a fait plusieurs séjours au Nunavik où elle a enseigné en 1975. Elle en a rapporté des paysages de toundra et de glace ainsi que des personnages attachants qu’elle dépeint dans toute leur humanité et avec beaucoup de sensibilité.

Ce sont des Inuits, bien sûr: le père de Pitaa, un chasseur qui intimide les enseignants; Qumaluq, le solitaire hanté par la guerre où il a perdu l’usage d’une jambe; Akinisie, la vieille guérisseuse; Annie, la mère d’une famille nombreuse; Kitty, l’adolescente déjà mère; Tamusi, le séducteur des Blanches… Ce sont aussi des Blancs: Jean-Claude Mailly, le représentant de la province, paternaliste et condescendant; Kurt, le géant blanc, commis à l’aéroport; et surtout Louise, l’enseignante fascinée par le Nord et pleine de tendresse pour ses habitants.