Le regard que porte Jean Désy sur la médecine est sans équivoque: il faut penser la médecine comme on rêve un poème. Il faut redonner au médecin le sens de l’amour qui est au cœur de sa pratique.
Dans ces nouvelles se côtoient l’extrême misère d’Haïti et de l’Afrique (la mort, toujours la mort!) aussi bien que la belle utopie d’Hygiksvall quelque part en Scandinavie, où tous les citoyens sont médecins. Et puis, il y a le Nord, si cher à Jean Désy, à propos duquel on trouve un texte magnifique qui clôt le recueil, étonnante interrogation sur le Bien et le Mal. Et si le Mal logeait au cœur même du Bien? Ces histoires médicales sont plus que des histoires. Ce sont des questionnements profonds sur l’être humain, sur les forces du bien et du mal qui le traversent depuis toujours et de part en part.
Extrait
Tout à coup, j’ai vu Frédéric qui entrait […]. Il revenait tout juste d’un assez long séjour en Afrique pour le compte de Médecins sans frontières. […] Frédéric semblait posséder un bagage inouï d’histoires plus tragiques les unes que les autres. Soudain, Pierre s’exclama: «C’est comme si tu revenais de l’enfer!» «De la barbarie!», répéta Frédéric, ce qui mit le peintre en verve: «En t’écoutant, je me suis dit que c’était par amour que ton âme avait un tel besoin de risquer sa vie. Comme si l’âme manifestait de cette façon son pouvoir sacré sur la mort, pouvoir qu’elle ne peut exercer qu’en s’offrant à la mort avec un magnifique saut dans le vide sans filet.»